Le 20 janvier, Joe Biden est donc devenu le 46ème président des États-Unis. On ne peut bien sûr qu'acter avec satisfaction qu'une de ses premières mesures ait été d'accepter de proroger de cinq ans le traité New START qui limite les armes stratégiques de la Russie et des États-Unis et qui arrivait à expiration. On peut aussi espérer qu'il reviendra sur les retraits de l'administration Trump d'autres traités de limitation des armements (traité FNI sur les missiles intermédiaires, basés en Europe) ou de confiance (traité "Ciel Ouvert" qui autorisait l'observation aérienne mutuelle par les pays de l'OTAN et de la Russie). Peut-être renouera-t-il même avec l'Iran en revenant à l'accord sur le nucléaire conclu avec Téhéran.
Cependant, le retour au multilatéralisme annoncé par Biden ne l’a pas empêché de désigner la Russie et la Chine comme ses ennemis. Ce retour risque de ne pas avoir de réel impact sur une course aux armements, devenue essentiellement qualitative, et la prolifération nucléaire qui en découle. Ainsi, il n’entre manifestement pas dans les intentions de la nouvelle administration états-unienne, pas plus que dans celles des autres puissances nucléaires, ainsi que de l'ensemble des États membres de l'OTAN, d'adhérer au Traité d'interdiction des armes nucléaires (TIAN), entré en force deux jours après l'investiture de Biden.
L'entrée en vigueur du TIAN, signé par 86 États, dont 52 l'ont déjà ratifié, rend en effet les armes nucléaires illégales pour une grande partie de l'humanité. En Europe seuls l’ont signé des pays hors-OTAN, tels l’Autriche, l’Irlande et la Serbie.
Rappelons qu'un pays aussi prompt à donner des leçons que la Belgique n'a bien entendu pas adhéré au TIAN, boycottant même courageusement les sessions de l'ONU qui étaient consacrées à l'élaboration du traité . Rappelons également que le sondage organisé par la Coalition Belge contre les armes nucléaires conclut que 77% de la population belge veut l’adhésion de notre pays à ce Traité.
Mais au moins, en ne signant pas le TIAN, la Belgique ne va pas le violer, comme elle fait actuellement avec le TNP qu’elle a signé. En effet, en entreposant sur son sol, à Kleine Brogel, quelques dizaines de bombes nucléaires états-uniennes, bientôt remplacées par la version améliorée B-61-12, la Belgique contrevient au Traité de non prolifération, puisque celui-ci interdit explicitement le transfert d'armes nucléaires. L’acquisition des ruineux F-35 dont la principale qualité semble être la capacité à transporter ces nouvelles bombes, démontre à nouveau que la Belgique consacre l'essentiel de ses dépenses militaires à mettre en œuvre la stratégie nucléaire de l'OTAN.
Si Trump a pu faire douter les milieux atlantistes, en déclarant l’Otan "obsolète" et en affichant des velléités de repli des Etats-Unis sur eux-mêmes (Macron allant même jusqu'à parler de "mort cérébrale"), les applaudissements de ces milieux à l'élection de Biden laissent craindre que l'alliance sera revitalisée et renforcée. Biden a déjà annoncé l'arrêt du retrait – décidé par Trump – de milliers de militaires U.S. d'Allemagne. Et son équipe est loin de rassurer les partisans de la paix.
Plus que jamais, la lutte contre l’OTAN et pour sa dissolution doit être au cœur des objectifs du mouvement de paix international. En Belgique, l’exigence de l'annulation du contrat d'achat des F-35, du retrait des bombes de Kleine Brogel et de la signature du TIAN, doit rester une priorité des organisations progressistes du pays.