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La guerre contre la Russie était préparée depuis longtemps

Roland Marounek
1 juillet 2022

Noël 2016. Les sénateurs étatsuniens Lindsey Graham et John McCain s’adressent à des militaires ukrainiens en présence du président Porochenko, en tenue tenue de combat1 :

Lindsey Graham : « Votre combat est le nôtre. 2017 sera l’année de l’attaque. Nous allons retourner à Washington et nous allons pousser le dossier contre la Russie. L’agression russe, ça suffit. Il est temps pour eux de payer un prix plus lourd. (...) Nous vous faisons la promesse d’amener vos appels à Washington, d’informer le peuple américain de votre bravoure,  et de porter le dossier contre Poutine devant le monde entier. »

John Mc Cain : « Je crois que vous allez gagner, je suis convaincu que vous allez gagner, et nous ferons tout ce que nous pouvons pour vous fournir ce dont vous aurez besoin  pour gagner. Nous [sic] avons réussi,  non grâce à l’équipement militaire, mais grâce à votre courage. Donc je vous remercie, et le monde regarde parce que nous ne pouvons pas permettre à Vladimir Poutine de réussir ici. Parce que s’il réussit ici,  il réussira dans d’autres pays

Deux ans auparavant, les États-Unis et l’UE avaient effrontément soutenu le coup d’état « euro-Maidan » ; pendant huit ans l’Otan allait soutenir sans sourciller le bombardement et les massacres dans l’est du pays par le régime issu du coup d’état et ses milices néo-nazies intégrées à l’armée nationale : Ce n’est définitivement  pas la Russie qui a ouvert les hostilités en Ukraine, comme le matraque ici le discours officiel.


John Mc Cain face aux protestataires du Maidan, au côté du fondateur du Parti National Socialiste d’Ukraine (rebaptisé ‘Svoboda’) « Le Monde Libre est avec vous, l’Amérique est avec vous »

Le jeu de l’Otan était parfaitement transparent : transformer l’Ukraine en une arme contre la Russie, en s’appuyant directement sur les héritiers revanchards de Bandera. L’organisation du coup d’état, la  volonté d’arracher les liens organiques avec la Russie sont les déclencheurs premiers de la tragédie d’aujourd’hui.

La séquence enregistrée démontre que le « régime US » planifiait depuis longtemps d’attaquer militairement la Russie en utilisant les Ukrainiens. Les deux politiciens républicains les poussent ouvertement à le faire.  Comme l’exprimait  leur confrère démocrate Lawrence H. Summers : « l’Ukraine est un avant-poste essentiel de nos intérêts militaires fondamentaux. »2

L’Occident se moque pas mal de l’Ukraine et des Ukrainiens : L’objectif est la Russie, et par-delà, la Chine promue « rivale systémique de l’Otan » lors du sommet 2021 :  « La meilleure façon de faire pression sur la Chine, qui est le plus dangereux et le plus puissant des deux rivaux, est en fait de s'assurer que la Russie soit vaincue, qu'elle n'atteigne pas ses objectifs dans cette guerre, car il en résultera une Russie plus faible, moins capable de faire pression sur les États-Unis et ses alliés en Europe, et donc moins utile comme partenaire stratégique pour Pékin » (Hal Brands, professeur à la John Hopkins University)

Les accords de paix, pas plus qu’une manière de gagner du temps


Un groupe de militants opposés aux accords de paix à Kiev, début février 2022

Le Wall Street Journal s’en félicitait ouvertement en avril 20223 : Les succès militaires de l’Ukraine sont le résultat de huit années d’entraînement de l’Otan. Depuis 2014, l’Otan préparait intensivement  l’Ukraine à la guerre. Lors des manœuvres militaires Defender 2021 de l’Otan,  un conseiller de Zelensky le reconnaissait sans ambages : « Nous nous entraînons pour, eh bien, disons-le directement, la guerre avec la Russie »4

Que valaient dans cette perspective de quelconques « accords de paix » ? Les accords de Minsk, signés par l’Ukraine sous l’égide de l’OSCE prévoyaient notamment une révision de la constitution ukrainienne pour arriver pacifiquement à une fédéralisation du pays. La Belgique, l’Allemagne, la Suisse... n’en ont pas fait un casus belli.

Mais la pacification du pays et la bonne relation avec la Russie n’étaient pas dans les plans des Etats-Unis et de l’Otan.

En 2019, le président actuel était largement élu, en particulier sur la promesse d’arriver à la paix avec l’Est en mettant enfin en œuvre les accords de Minsk. Zelensky était-il alors naïf, inconscient des enjeux que l’Ukraine devait jouer malgré elle - et contre ses intérêts mêmes ? En tout cas ceux qui détenaient le réel pouvoir en Ukraine devaient rapidement se charger de le ramener à la réalité : Une semaine après l’investiture de Zelensky, Dmytro Yarosh, fondateur du groupe paramilitaire néo-nazi Secteur Droit (qui avait joué un rôle essentiel dans le coup d’état ‘euro-maidan’) donnait une interview5 où il menaçait explicitement Zelensky de mort s’il s’avisait de prendre les accords de Minsk au sérieux :  « Le format de Minsk est l'occasion de gagner du temps, d'armer les forces armées, de passer aux meilleurs standards mondiaux dans le système de sécurité et de défense nationale. C'est une opportunité de manœuvre. Mais pas plus. »

Ça a le mérite d’être clair : Il n’a jamais été dans les intentions pour les extrémistes ukrainiens soutenus par l’Otan de parvenir à la paix. « Nous (les USA) vous fournirons tout ce dont vous aurez besoin pour gagner » encourageaient les Mc Cain et consort. Que faire d’accords de paix avec de tels soutiens ! La confrontation avec la Russie était parfaitement prévisible, et souhaitée.

De façon intéressante, Dmitro Yarosh, celui qui menaçait ainsi ouvertement le président élu, était nommé en novembre 2021 par ce même président,  conseiller du commandant en chef des armées ukrainiennes...

« Un point de basculement dans l’histoire » 

En décembre dernier, la Russie avait mis brutalement les pays de l’Otan face à leur hypocrisie en proposant un plan de paix global, dont le point central était l’affirmation de l’indivisibilité de la sécurité : personne n’a le droit de renforcer sa sécurité au détriment de celle des autres. L’expansion continue de l’Otan à l’Est, présentée ici comme ‘sécurité absolue de l’Occident’ signifie de fait l’insécurité absolue de la Russie.

L’un des points principaux du traité proposé était la neutralité de l’Ukraine : « Inacceptable » pour l’Otan ! Il est intéressant de rappeler qu’en 1954 les pays de l’Otan avaient pareillement jugé « inacceptable » la demande par l’URSS de la neutralité pour l’Allemagne et l’Autriche. Un an plus tard, l’Autriche inscrivait la neutralité perpétuelle dans sa constitution, renonçant à adhérer à toute alliance militaire et à accueillir toute base militaire étrangère sur son sol, évitant ainsi le sort de l’Allemagne dont l’adhésion de la partie occidentale à l’Alliance en 1955 provoquait la création du Pacte de Varsovie et l’aggravation des tensions militaires en Europe.

Bien sûr la Russie ne pouvait ignorer que sa proposition avait très peu de chances d’aboutir : car cela aurait enlevé tout le sens à ce que faisaient les Etats-Unis et l’Alliance depuis les années 90, et en particulier signifié le désaveu complet du coup de 2014. Mais les organisations pacifistes qui aujourd’hui accablent la Russie s’étaient montrées bien discrètes alors.  Exiger ici la fin de l’extension de l’Otan à l’Est, écouter les demandes légitimes de sécurité de l’autre érigé en ennemi,  était pourtant la seule voie raisonnable pour éviter la guerre.

La Russie a-t-elle commis une erreur en précipitant, elle, une confrontation préparée par l’Otan ?  Ceux qui affirment qu’elle est « tombée dans un piège », regrettent en quelque sorte que la Russie n’ait pas laissé les plans d’étranglement se dérouler comme prévu, et laissé l’Otan se renforcer et s’implanter en Ukraine, à 500 km de Moscou. Il s’agit de sa survie même, en tant que nation indépendante – ou en tant que nation tout court.

« Nous sommes à un point de basculement dans l’histoire » a déclaré Joe Biden au début du conflit. Et il a parfaitement raison. Le Ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, abonde d’ailleurs dans son sens, de manière plus élaborée : « La Russie, les États-Unis, la Chine et tous les autres se rendent compte que c’est aujourd’hui que se décide si l’ordre mondial deviendra équitable, démocratique et polycentrique, ou si ce petit groupe de pays pourra imposer à la communauté internationale une division néocoloniale du monde entre ceux qui se considèrent comme « exceptionnels » et les autres »6.

La Russie ne se bat pas contre l’Ukraine,  mais contre l’Otan en toute connaissance de cause et de conséquence. Au-delà des tragiques défilés des infos, des récits d‘atrocités, des massacres, réels ou mis en scène par des psy-op évidemment hyperactifs, derrière la couverture émotionnelle unilatérale de la guerre qui occulte l’enjeu, la question réelle de ce conflit est la persistance ou non de la domination unipolaire de l’« Occident global » au 21e siècle, sur l’ensemble de la planète.

Roland Marounek
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