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La stratégie nucléaire de l’OTAN après le Sommet de Chicago

Georges Spriet
4 août 2012

A sa création après la Deuxième guerre mondiale, l'OTAN avait comme objectif fondamental la consolidation et protection d'une zone de libre commerce en Europe occidentale sous influence des grandes entreprises américaines. Aujourd'hui cette zone s'est étendue sur l'Europe entière et a la vocation d’avancer vers l'Asie. La domination américaine sur le double continent Europe-Asie est devenue une condition absolue pour que les Etats - Unis puissent garder leur position de 'premier pays du monde'. La concurrence économique avec la Chine se traduit aussi dans des repositionnements militaires et des alliances nouvelles ou renforcées en Asie et au Moyen Orient.

Le processus de révision de la « Posture de Dissuasion et de Défense » des dernières années n'a produit aucun changement important. Beaucoup de journalistes pensent y voir des signes de discordance fondamentale entre les membres. Il est vrai que l'Allemagne soutient une autre position à propos des armes nucléaires en Europe, que la France ou la Pologne ou les pays Baltiques. Il est vrai aussi que Berlin n'était pas du tout content de la politique guerrière de Paris et de Londres envers la Libye. Il n’en reste pas moins que l'OTAN continue à se développer comme bras armé d'un occident qui cherche à renforcer sa place dans le monde globalisé.

Regardons d’un peu de plus près le texte de la « Déclaration de Chicago » adoptée par le Sommet de l’OTAN en mai 2012.

Posture de dissuasion et de défense: (extrait du document officiel)
Bien que la menace d'une attaque conventionnelle contre l'OTAN soit faible, la menace conventionnelle ne peut être ignorée. La persistance de conflits régionaux reste une source de préoccupation majeure pour l'Alliance, de même que l'augmentation des dépenses de défense dans d'autres parties du monde et l'acquisition, par certaines puissances émergentes, de capacités de plus en plus sophistiquées. La mondialisation, les défis de sécurité émergents, comme les cybermenaces, les contraintes majeures en termes d'environnement et de ressources, y compris le risque de perturbation des approvisionnements en énergie, ainsi que l'apparition de nouvelles technologies continueront de dessiner l'environnement de sécurité futur dans des secteurs d'intérêt pour l'OTAN. Un certain nombre d'États vulnérables, faibles, en déliquescence ou faillis, ainsi que les capacités croissantes des acteurs non étatiques, resteront sources d'instabilité et de conflit potentiel. Ces facteurs, ainsi que les menaces et les défis existants, comme la prolifération des missiles balistiques et des armes de destruction massive, la piraterie et le terrorisme, continueront de contribuer à rendre l'environnement de sécurité imprévisible.

Plusieurs éléments sont à souligner dans ce tableau que présentent les stratèges de l'OTAN :

  • L'approche fondamentale reste la confirmation d'un occident supérieur qui veut garantir ses privilèges d'accès à toutes les richesses de ce monde et garantir l’approvisionnement en énergie ;
  • l'OTAN tient pour cela à sa disposition un « mix » d'armes conventionnelles et nucléaires et se dote d'un bouclier anti-missiles ;
  • Elle maintient sa stratégie d'intervention en dehors du territoire de ses membres et conclut des accords militaires avec des alliés dans les autres continent: Japon – Australie – Israel – Qatar etc.. ;
  • Il faut s’attendre dans le futur à de nouvelles actions type Libye, “coalition of the willing NATO-members” ;

La Posture de Défense et de Dissuasion se base sur un mix de nucléaire, conventionnel, bouclier, contrôle d'armement & désarmement & non-prolifération .


La contribution des forces nucléaires (extrait du document officiel)
10. Les Alliés prennent note de l'importance des garanties de sécurité négatives indépendantes et unilatérales offertes par les États-Unis, le Royaume-Uni et la France. Ces dispositions, sans préjuger des conditions particulières que chaque État y a attachées, s'agissant notamment du droit naturel de légitime défense tel qu'il est reconnu par l'article 51 de la Charte des Nations Unies, garantissent le non-recours ou la nonmenace de recours à l'arme nucléaire contre des États non dotés d'armes nucléaires qui sont parties au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires et qui se conforment à leurs obligations de non-prolifération nucléaire. Les Alliés reconnaissent en outre l'utilité que peuvent présenter ces déclarations aux fins de décourager la prolifération nucléaire. Les Alliés notent que les États ayant affecté des armes nucléaires à l'OTAN appliquent à ces dernières les garanties que chacun d'entre eux a offertes sur une base nationale, y compris les conditions particulières qu'ils y ont attachées.

Ici, la confirmation de la politique de première frappe nucléaire saute aux yeux. C'est particulièrement dans ce cadre qu'il faut voir la construction du bouclier : une défense pour stopper une contre-attaque affaiblie éventuelle par l'ennemi , c.à.d par ceux qui ne se conforment pas à leurs «obligations de non-prolifération nucléaire ».

11.Tout en cherchant à ménager des conditions propices à de nouvelles réductions des armes nucléaires non stratégiques affectées à l'OTAN et en étudiant les diverses possibilités s'offrant en la matière, les Alliés concernés feront en sorte que tous les éléments composant la dissuasion nucléaire de l'OTAN restent sûrs, sécurisés et efficaces aussi longtemps que l'Alliance demeurera une alliance nucléaire. Cela exigera un maintien de l'attention des dirigeants et une excellence institutionnelle pour la mission de dissuasion nucléaire, ainsi que des directives de planification alignées sur les exigences du XXIe siècle.

En d'autres termes, l' Otan veut garder sa position dominante, entre autres grâce aux armes nucléaires et les membres s'engagent à réaliser un programme de modernisation des armes nucléaires.

12. Conformément à notre engagement de rester une alliance nucléaire aussi longtemps qu'existeront des armes nucléaires, les Alliés sont convenus que le Conseil chargera les comités compétents demener une réflexion sur la manière d'assurer une participation aussi large que possible des Alliés concernés à leurs arrangements pour le partage du nucléaire, notamment au cas où l'OTAN devrait décider de réduire sa dépendance à l'égard des armes nucléaires non stratégiques stationnées en Europe.

En effet, cet article du texte officiel ne fait que confirmer que L'OTAN veut rester une alliance nucléaire aussi longtemps que l'arme nucléaire existera, avec un mix d'armes stratégiques et non-stratégiques. Il n'y aura pas d'abandon non plus de la politique pour “baser à l' avant” des armes nucléaires non stratégiques, dans ce cadre on parle surtout du souci de garder la garantie américaine pour la défense européenne. Il n'y a actuellement pas de réponse aux demandes de l’Allemagne, Hollande, Belgique, Luxembourg et de la Norvège. Mais peut-être la crise économique suscitera de nouvelles discussions sur les coûts de l'Otan et donc aussi sur ces sections qui ne sont pas vraiment essentielles sur le plan miltaire?

La contribution de la maîtrise des armements, du désarmement et de la nonprolifération
26. Depuis la fin de la Guerre froide, l'OTAN a radicalement réduit le nombre et le type d'armes nucléaires stationnées en Europe, la disponibilité opérationnelle de ces armes, ainsi que sa dépendance à l'égard des armes nucléaires dans sa stratégie. Dans ce cadre, et au regard de l'environnement de sécurité plus large, l'OTAN est prête à envisager de réduire encore son besoin en armes nucléaires non stratégiques affectées à l'Alliance dans le contexte de mesures réciproques de la part de la Russie, en tenant compte du stock russe d'armes de ce type stationnées dans la zone euro-atlantique, qui est plus important.
27.Les Alliés sont convenus que le Conseil chargera les comités compétents d'envisager plus avant, dans le contexte de l'environnement de sécurité plus large, les mesures réciproques que l'OTAN escompterait de la part de la Russie afin de procéder à des réductions significatives des armes nucléaires non stratégiques basées à l'avant qui sont affectées à l'Organisation.

Ici, les 'faucons' ont vraiment réussi à bien placer leurs pièces sur l' échiquier. L'exigence de réciprocité de la Russie en cas de réductions éventuelles des armes non stratégiques en Europe renvoie aux calendes grecques la décision que réclament l'Allemagne et ces quelques autres pays. La Russie n'a pas d'armes nucléaires sur le territoire d'autres pays, donc la réciprocité n’intéressera pas du tout Moscou. D'autant plus ces armes américaines non pas de valeur militaire ajoutée. Est-ce la raison militaro-stratégique de la modernisation des bombes de Kleine Brogel vers un B61-12 qui deviendra une bombe guidée pour des bombardiers à long vol, ce qui pourrait inquiéter Moscou? L'autre face de la monnaie nous montre l’accroissement des coûts pour cette évolution, d'une bombe à gravité vers une bombe guidée à capacité de « bunkerbuster ». Pourra-t-on garder l'attitude “business as usual” actuelle au sein de l'OTAN ? Est-ce que la soi-disant unité otanienne tiendra lors de ces discussions budgétaire en période de crise économique et financière profonde ? De plus les décisions autour du remplacement des F-16 se rapprochent à grande vitesse. Est-ce que la Belgique suivra l'Allemagne qui choisit un chasseur non-équipé pour des bombes nucléaires, ou suivra-t-elle les Pays Bas avec qui le Ministre belge de la Défense belge veut faire cause commune ?

Le bouclier anti-missiles
19. À Chicago, les chefs d’État et de gouvernement ont annoncé que l’OTAN était parvenue à une capacité intérimaire pour sa défense antimissile. Les ÉtatsUnis apporteront à la défense antimissile de l’OTAN leur approche adaptative phasée pour l’Europe. Les dirigeants des pays de l’Alliance saluent également la décision prise par les différents Alliés de contribuer à la mission de défense antimissile de l’OTAN, et ils encouragent les appels à de nouvelles contributions volontaires éventuelles des Alliés, y compris dans le cadre d’une coopération multinationale, pour fournir les capacités appropriées. (...)
21. La défense antimissile de l’OTAN n’est pas dirigée contre la Russie ; elle n’a pas non plus la capacité de porter atteinte à la dissuasion stratégique russe. L'Alliance, dans un esprit de réciprocité, de transparence maximale et de confiance mutuelle, cherchera activement à coopérer avec la Russie dans le domaine de la défense antimissile et, conformément à la politique OTAN sur l’engagement avec les pays tiers dans le domaine de la défense antimissile balistique, à collaborer avec d’autres pays concernés, qui seront déterminés au cas par cas.

Les Américains fournissent la quasi totalité des éléments techniques pour le bouclier. Quelle est la facture exacte que paieront les alliés européens ? Est-ce que le Sénat US restera prêt à dégager des fonds pour la défense d'une Europe « ingrate » à ses yeux ? Ou estimera-t-il que le bouclier pourrait être moins cher que le stationnement de grands contingents de troupes américaines en Europe? Une autre question n'a pas encore reçu de réponse satisfaisante : c’est le pourquoi du refus d'une garantie légale de la part de Washington que ce système anti-missiles ne soit pas utilisé contre la Russie, comme exige Moscou.

En guise de conclusion je voudrais partager avec vous quelques points qui sont prioritaires pour le mouvement de paix en Belgique. Il doit d'abord et avant répéter sans cesse que l'Otan doit disparaître.

L' Alliance atlantique est l' instrument fondamental de domination de l'occident et d'un modèle économique néo-libéral mondialisé.

Il faut en même temps travailler pour le renforcement du mouvement anti-nucléaire sur des revendications claires :

  • Une Europe sans armes nucléaires : no forward based nukes in Europe!
  • Refus des bombes B61-12
  • Refus du partage nucléaire

En d'autres termes, le mouvement de paix belge et européen devra tout faire pour que le désaccord interne au sein de l'OTAN s'accentue sur cette 'garantie' pour une responsabilité américaine dans la défense européenne. Et sur le dossier du remplacement du F16, la collaboration étroite avec le mouvement de paix hollandais me semble essentielle.

Une campagne d'information sur le bouclier comme élément de la politique « first strike » parmi la population et parmi le personnel politique reste nécessaire, ainsi qu'un plaidoyer pour des relations européennes (hors Otan) correctes avec la Russie.

Georges Spriet
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